Publié sur Linkedin, 2 juin 2024.
Le feuilleton trumpien poursuit sa course folle, chaque défaite est maquillée en Victoire, la haine vengeresse prend ses positions pour Novembre. La moitié des Américains applaudit à tout rompre devant celui qui hurle qu’en 24 heures il règlerait tous les problèmes de la planète (de l’Ukraine au Moyen-Orient, de la Chine à la Corée du Nord), qu’il se fait fort de descendre n’importe qui sur la Vème Avenue sans que personne ne vienne lui chercher misère, que la Justice de son pays est tout entière à pulvériser, comme le FBI, comme l’État « profond »… Make Me Great Again.
Dans tous les pays du monde, le même torrent semble commencer à saper la raison comme le droit, la dignité comme la morale. La démocratie apparaît surannée, le vivre « ensemble » laisse place au vivre « moi contre tous les autres ». La ligne gagnante : faire sauter tous les ponts, tous les ancrages, ériger partout des murs.
En défense, on tente de faire valoir la raison, la démonstration point par point, les exigences morales… Nécessaire, mais insuffisant.
Il faut aller au fond de ces vortex qui peuvent tout emporter. Les citoyens du monde, dans une large part, sont profondément DÉBOUSSOLÉS.
Comment suivre les déferlements technologiques et scientifiques ? Comment vivre des chocs environnementaux qui s’annoncent terrifiants ? Comment tolérer un monde aux frontières de plus en plus intenables ? Comment se remettre à penser et subir la Guerre ? Comment vivre quand le chaotique s’accélère, sur tous les fronts, à tout moment ?
L’épuisement devant les chocs, les menaces, la complexité, semble avoir trouvé la ligne de fuite la plus tentante : aller à fond vers les abysses. Voici la fierté de suivre l’imposteur qui promet tout sur tout, en ne précisant rien sur rien. Difficile, le vivre ensemble ? Allons résolument dans la haine.
Si l’on ne veut pas capituler devant les logiques mortifères, il serait urgent de se mettre en capacité de faire les sauts créatifs indispensables. Ne pas se contenter de conformité, de continuité d’activité, d’une acceptation par défaut des injustices et dérives les plus destructrices.
Pour l’heure, on préfère le plus souvent s’en tenir à un « pas possible aujourd’hui », « ne dramatisons pas », « on a déjà assez à faire avec les urgences du quotidien », « on va leur expliquer »…
Où sont les clarifications et les initiatives décisives ? Quand on aura trop attendu, il sera un peu tard pour se lamenter.
Nous avons un besoin existentiel de créativité personnelle et collective. Les routes à ouvrir sont innombrables. Il faut se mettre en capacité de le faire. Et le plus crucial tient à la volonté de le faire. Just do it ! Now.
Pour approfondir : SOCIÉTÉS DÉBOUSSOLÉES – OUVRIR DE NOUVELLES ROUTES, PERSÉE, SEPTEMBRE 2023.
https://www.editions-persee.fr/wp-content/uploads/2023/09/Dossier-presse-Lagadec.pdf